Dossier coordonné par Ulrike Lune Riboni et Raphaële Bertho.

Les industries culturelles et médiatiques paraissent omnipotentes dans la sélection et la diffusion des images qui vont faire l’information ou « faire l’histoire ». Comme l’ont démontré plusieurs travaux, les médias traditionnels sont en effet les principaux acteurs de la production des icônes visuelles (Hariman et Lucaites, 2007 ; Lavoie, 2010), par la répétition et la « circulation circulaire » (Bourdieu, 1996) en particulier. Au-delà de la consécration de certaines images, les institutions médiatiques et culturelles ont le pouvoir de faire exister ou au contraire de taire l’existence d’événements, de groupes sociaux, de récits minoritaires en déterminant la « hiérarchie du voir » (Voirol, 2005a). Par ailleurs, quand ces événements, groupes et récits minoritaires sont représentés, les modes de représentation qu’offrent les espaces médiatiques et culturels dominants semblent verrouillés, souvent défavorables ou partiels. Les réseaux sociaux numériques paraissent cependant déstabiliser cette hégémonie (Gunthert, 2015) et participent à la reconfiguration des régimes de visibilité et de représentation à l’œuvre. Si le système médiatique et les industries culturelles continuent d’être des instances de validation et de constructions des représentations, elles doivent également prendre en compte les tendances qui, en particulier en ligne, désignent d’autres images, d’autres actualités et d’autres histoires. Par ailleurs, les productions culturelles et contenus médiatiques visuels traditionnels ne sont pas sans faire l’objet de processus de négociation de sens et de véritables querelles interprétatives. Identifiés de longue date par les auteurs qui ont interrogé la réception (Hall, 1994), ces processus de négociation de sens trouvent de nouveaux canaux d’expression et se nourrissent désormais de la conscience des alternatives disponibles. Ce sont ces récits visuels alternatifs et les réceptions différenciées des images hégémoniques que ce 54e numéro d’Études de Communication propose d’interroger.

Sommaire
Introduction, Ulrike Lune Riboni et Raphaële Bertho

Race, visualité et histoire, Martin A. Berger

Des images en débat : de la blessure de Geneviève Legay à la répression des Gilets Jaunes, Édouard Bouté et Clément Mabi

Victimes de violences conjugales face aux campagnes institutionnelles entre ventriloquie, injonctions et paradoxes, Giuseppina Sapio

Les réponses des fans aux représentations lesbiennes fictionnelles : le cas de The 100 et Wynonna Earp, Mélanie Bourdaa

Iconographies médiaclastiques des corps noirs : des innovations visuelles au service d’alternatives représentationnelles, Emmanuelle Bruneel

Donner à voir le lecteur sur les réseaux sociaux numériques : « Bookstagram », entre nouveaux régimes de visibilité et iconographies standardisées, Marine Siguier